Retour sur les journées nationales de l’Agence Nationale des Elus du Littoral (ANEL) au Havre.
L’atelier consacré à l’anticipation des risques naturels a été l’occasion de rappeler la position de « sentinelles du changement climatique » qu’occupent nos territoires ultramarins et valoriser le travail de la délégation sénatoriale aux outre-mer sur ce sujet.
Le Premier ministre a ouvert les travaux de la deuxième journée.

10-12 octobre 2018 – Le Havre
Atelier n°2 : Comment anticiper les risques naturels pour préserver l’attractivité des territoires littoraux?

Intervention de M. Michel Magras, sénateur de Saint-Barthélemy, Président de la Délégation sénatoriale aux outre-mer


 

Mesdames, Messieurs,

 

Avant d’aborder notre sujet relatif à l’anticipation des risques naturels majeurs, je tiens à remercier l’ANEL et la ville du Havre pour leur accueil de qualité et le choix judicieux des thèmes traités au cours des trois journées d’étude.

 

Je veux en particulier souligner la présence de représentants de nos outre-mer dans chacune des tables rondes et chacun des ateliers, et féliciter de cette sollicitation mon collègue sénateur du Pas-de-Calais, Jean-François Rapin, qui préside avec bonheur aux destinées de l’ANEL. Les regards croisés entre nos territoires de l’hexagone et des outre-mer doivent être encouragés, car nous avons beaucoup à apprendre les uns des autres et pareille démarche est encore trop peu prisée dans les initiatives nationales. Mais il est vrai que le témoignage des outre-mer paraît incontournable lorsqu’il est question d’espaces littoraux, de transition énergétique, de métiers de la mer et d’activités nautiques, d’innovation et d’économie bleue ou encore de risques naturels majeurs!

 

Sur nombre de ces sujets, nos outre-mer des différents bassins océaniques sont en effet aux avant-postes; les questions relatives à l’environnement et aux effets des évolutions climatiques y sont particulièrement prégnantes.

 

Pour cette raison, la Délégation sénatoriale aux outre-mer que j’ai l’honneur de présider a articulé une grande partie de son programme de travail autour de ces thématiques. Nous avons ainsi noué un partenariat avec l’Agence française pour la biodiversité pour l’organisation d’un cycle triennal de conférences sur les biodiversités ultramarines de chaque bassin océanique. Je vous invite à en consulter les actes qui sont en ligne sur le site internet du Sénat.

 

Après le Pacifique, en mai dernier, la conférence de cette année visitera vraisemblablement les six territoires français du bassin Atlantique. Nous cherchons à contribuer à donner une visibilité positive à ces territoires qui abritent, rappelons-le, 80 % de la biodiversité nationale, soit un patrimoine naturel considérable : la biodiversité maritime et littorale y est bien sûr prévalente et celle-ci est au cœur des enjeux de développement des territoires – je pense évidemment au tourisme, mais aussi aux procédés innovants très divers qui vont du bouturage du corail à l’utilisation des micro-algues pour la production de matières plastiques nouvelle génération, de cosmétiques révolutionnaires ou encore d’énergie propre.

 

Comme notre délégation a pu le mettre en lumière dans un rapport d’information de 2015 présentant des solutions originales développées outre-mer pour contrer les effets du changement climatique et prévoir des adaptations, nos outre-mer, du fait de leur situation géographique et de leur éloignement de l’hexagone, doivent être créatifs : exposés à des risques multiples et parfois cumulatifs (ouragans, houle voire tsunamis, risque sismique majeur aux Antilles mais aussi très présent à Mayotte, inondations dévastatrices comme nous avons pu l’éprouver cette année en Polynésie et à La Réunion, glissements de terrain…), nos territoires font figure de pionniers. Ils sont d’ailleurs souvent désignés comme les « sentinelles du changement climatique».

 

Cela a conduit la délégation sénatoriale, à la suite de la dévastation des îles du Nord de la Guadeloupe par l’ouragan Irma en septembre 2017, à se pencher sur l’organisation de la prévention et la gestion de l’urgence dans l’ensemble des outre-mer. Ce premier rapport, qui sera suivi d’un second cette année centré sur les thèmes de la reconstruction et de l’organisation de la résilience des territoires, a formulé une soixantaine de propositions qui inspireront, je l’espère, le projet de loi annoncé par le Président de la République pour fin 2019.

 

Il ne me sera pas possible, dans les quelques minutes qui me sont imparties, de les exposer toutes et, pour ceux qui n’en auraient pas encore eu connaissance, je vous invite à les découvrir en ligne sur notre site ou sur le document de synthèse que j’ai apporté à votre attention. Je me concentrerai à cet instant sur la problématique de l’anticipation qui est au cœur de notre atelier en ciblant 3 aspects:

 

1. Tout d’abord l’anticipation suppose une démarche prospective et passe par une connaissance fine des risques et de leur impact potentiel selon les caractéristiques du territoire concerné. La recherche scientifique doit donc être vigoureusement encouragée, d’autant que nous avons la chance d’avoir des opérateurs dynamiques et performants tels que Météo France ou le BRGM, et elle doit déboucher sur une cartographie des risques et des impacts susceptible de servir d’aide à la décision pour parer plus rapidement à l’urgence lorsqu’une catastrophe est imminente et pour raccourcir les délais d’intervention. Le recensement des vulnérabilités et l’évaluation des effets constituent des paramètres stratégiques de l’anticipation et du pilotage des crises;

 

2. En deuxième lieu, la sensibilisation, l’acculturation des populations sont également essentielles en matière de prévention. L’éducation des plus jeunes, qui bien souvent contribue activement à la sensibilisation des plus âgés, les campagnes d’information, la signalétique sur le terrain, ou encore l’organisation d’exercices grandeur nature qui concrétisent le risque sont indispensables à une anticipation efficace. Dans ce domaine, j’ai la faiblesse de penser que nos outre-mer ont quelques longueurs d’avance et ont développé une véritable culture du risque!

3. Enfin, une anticipation efficace passe par la capacité à mobiliser et à coordonner très rapidement tous les acteurs de la gestion de l’urgence. Bien au-delà des autorités décisionnaires, politiques et administratives, et des forces de secours de sécurité civile ou militaire, il s’agit de fédérer toutes les énergies et les compétences dans une démarche inclusive. Je pense aux opérateurs de réseaux, aux médias et aux acteurs du numérique qui sont capables de dynamiser l’alerte, de relayer les informations fiables et de combattre les fausses nouvelles. Encore une fois, l’information est une clé de l’anticipation des situations de crise.

 

Mais j’ai largement épuisé mon temps de parole et nous pourrons revenir sur toutes ces questions si vous le souhaitez.
Je vous remercie.

Michel Magras
Sénateur de Saint-Barthélemy
Président de la Délégation sénatoriale aux outre-mer